All language subtitles for Les Morfalous (1984).BDRip.1080p.10bit.HEVC.PlamenNik.(fr)

-Descendez!

-Vous pouvez disposer.

-Repli général sur le hammam!

-L'escalier!

Et maintenant?

Qu'est-ce qu'on fait?

-On continue la mission.

-Les pertes élevées
qu'on vient…

-Oh là, là, militaire,
où vous allez?

Des pertes élevées?

On a perdu à peine 90 %
de l'effectif.

Pour l'adjudant Mahuzard,

des pertes en dessous de 100 %
ne peuvent être que relatives.

-Vous ne croyez pas
que les pertes relatives

que nous venons de subir
méritent une petite explication?

-Elle est là,

l'explication.

Notre mission consiste
à prendre l'or dans cette banque,

le charger dans le fourgon

et escorter tout ça jusqu'à Sfax,
point final.

-C'est drôle…

Même au milieu des trous d'obus,
même sur une place

crevassée, esquintée,
c'est bandant, une banque.

-Brigadier Béral,

2e compagnie d'infanterie coloniale,
batterie Mercier.

-Et où est la batterie Mercier?

-Anéantie, mon adjudant.

On a tenu longtemps avec notre 105,

on a repoussé 3 attaques,
on a même détruit un char,

mais finalement,
c'est un Stuka qui nous a eus.

Il nous a canardés
à même pas 100 m en rase-mottes.

Je me suis retrouvé sur le cul
en pleine rue.

Vous avez déjà été arrosés
par un Stuka, vous?

C'est l'enfer.

-Un appareil extrêmement efficace.

On aurait dû en acheter,
avant que ça tourne mal.

-Écoutez-moi bien,
vous autres.

Les Fritz, je les emmerde.
Le Mahuzard, il en a vu d'autres.

Dans le camion, y a de quoi
leur clouer les couilles au mur.

Le tout, c'est d'y arriver, au GMC.

Dès que la nuit va tomber, je vais
tenter une sortie au ras du sol.

J'ai besoin d'un homme.

Alors, messieurs, qui m'accompagne?

Merci!
Y a pas si longtemps,

quand on disait "Que les volontaires
sortent des rangs",

tous les légionnaires
avançaient d'un pas.

-Les temps ont changé,
mon cher Édouard.

-"Mon adjudant”.
Et les légionnaires aussi.

-Ça, c'est vrai, mon adjudant.
Y a qu'à regarder dehors.

30 légionnaires d'un coup,
et en 2 minutes.

C'est fou ce qu'ils ont changé.

-Toi, ta gueule.

Et les artilleurs?
Ils en pensent quoi, de tout ça?

-Là, ils en pensent rien du tout.

Rien du tout.
Je suis pas légionnaire, moi.

Je fais pas partie de votre truc.

Et si vous voulez tout savoir,
j'allais être évacué.

-Évacué? Tiens donc.
Et pourquoi?

-Ben.… Je vais sans arrêt,
mon adjudant.

-Tu vas où?

-Ben, au…
Je crois que c'est la dysenterie.

-Pourquoi t'appelles pas ça
la chiasse?

-Parce que la chiasse,
ça veut dire la courante.

Ça veut dire la pétoche.

La dysenterie, c'est technique.
C'est dans les manuels.

-Tu serais pas un peu con, toi?

-Garde à vous!

Quand on s'adresse à un supérieur,
on se met en position,

et l'on nomme ledit supérieur
par son grade.

Vous seriez pas un peu con,
sergent Augagneur?

Allez, rompez.

-Mais qu'est-ce qu'il fait?

-Il sait pas.

Dès que la nuit tombe,
on ne le contrôle plus.

-Pourquoi il se met du…

-Il se maquille toujours
quand il sort le soir.

Alors, mon adjudant,

qu'est-ce qui vous ferait plaisir,
comme citation?

Je pense à quelque chose
dans le genre…

"Adjudant Mahuzard du 1er bataillon
de marche de la légion étrangère

"tombé, alors qu'il tentait
une sortie audacieuse

"dans une situation désespérée."

-C'est un point de vue
de civil, ça.

Militairement, une situation
n'est jamais désespérée.

Point final.

Prêt, Borzik?

-Prêt. Sois économe.
C'est tout ce qui reste.

-Borzik, je peux te charger
d'une commission?

-Dis toujours.

-Si tu passes près du grand homme,
le capitaine Schlotzer,

tu peux lui glavioter dessus?

-Je vous interdis d'insulter
vos supérieurs. Point final.

-D'après cet empaffé, y avait plus
un seul Fritz à El Ksour.

Je l'entends encore.
"Sergent, c'est même pas un commando.

"C'est une escorte administrative.

"Ce soir, nous baiserons
les putes de Sfax."

-Je sais pas
si on verra Sfax un jour,

mais je sais qui est baisé
dans cette histoire.

-Dysenterie,
fais pas chier les autres!

-Point final.

À ton avis, y a combien
dans le coffre? T'as une idée?

-Quand j'ai entendu
Schlotzer en parler, 6.

-6 quoi?

-6 milliards.
Et en barres d'or.

-Qu'est-ce qu'on peut bien faire
avec 6 milliards?

-Rien.

C'est ça, l'agrément.
Ça permet de plus rien foutre.

Les v'la!

-Arrête, ça sert à rien!

-Bon Dieu,
tu vas nous faire repérer!

-Bon. Nous voilà revenus
au point zéro.

-Non. On avait 3 chargeurs
et on est à 3 en dessous de zéro.

-De toute façon,
chargeurs ou pas,

ce qu'il faudrait, c'est un canon.

-Il y a.

-Je croyais que ta batterie
avait été ratatinée.

-Les hommes, pas le canon.

Le 105 est en état de marche.

-Et il est où, ton 105?

-De l'autre côté, là-bas.
Y a même pas 400 m.

-T'entends ça, Boissier?

À peine 400 m,
qu'il dit, l'artilleur.

Borzik et Mahuzard…

ont même pas pu en faire 50,
connard!

-Et si on se rendait?

Ça peut paraître
une idée simple, mais…

-Mais non, mais non.
C'est une idée comme je les aime.

Malheureusement,
dans la légion, ça se fait pas.

-Depuis quand?

-Depuis Cameron. 30 avril 1863.

Nom de Dieu…

Je me voyais déjà monter
les Champs-Élysées,

salué par les flics,

baiser les femmes des collabos.

Au lieu de ça,
on va finir dans le sable chaud,

comme dans une chanson de Piaf.

Merde, les voilà.

Ils sont que 2.
Leur mépris me fait chier.

On est sous-estimés, les gars.

-Putain, j'ai les jetons.

-Non, c'est une impression.

Tu peux pas avoir les jetons,
t'es un SS.

La mort, c'est ton truc.

Regarde pas du côté de tes potes.

Redresse-toi.
Pense à Adolphe.

-Arrête de déconner, merde!

-Oh, le con.

-Alors, mon adjudant?
On dirait qu'on respire mieux.

-Y a des circonstances
OÙ il vaut mieux voir arriver

un mauvais Français
qu'un bon Allemand.

-Très juste.

"Auf Wiedersehen", mon adjudant.

Qu'est-ce qu'il y a?

-C'est là.

-On est arrivés.
Y a à peine 200 m.

-À découvert. L'occasion
de se faire descendre 200 fois.

-Alors, creuse ton trou.

-Un de plus ou de moins,
vous faites pas le détail.

Ce matin, vous en avez laissé 30
sur le carreau.

Puisque t'es si fort,
t'as qu'à y aller tout seul.

-Écoute-moi, Béral.

Béral…

Tu m'entends?
-Oui, 5 sur 5.

-Je vais aller
et tu vas venir avec moi.

Il faut des légionnaires,
mais aussi des artilleurs.

Tu te rappelles de la chanson?

Comment c'est, l'air, déjà?

"Quand l'artilleur de Metz
quitte sa garnison,

"toutes les femmes de Metz
se mettent à leurs balcons."

Allez, viens.

Allez, Béral.

Maintenant, tu vas nous montrer
ce que tu sais faire.

Là-dedans, le suis sûr que tes bon.

Pas dans tout, mais là-dedans,
je suis sûr que t'es bon.

-Je vais essayer.

-Te presse pas.

Applique-toi.

-Le problème, c'est la bulle.
Faut la régler poil-poil.

-Eh ben, règle-la.

Prends ton temps.

Ce que je veux pas,
c'est qu'on les loupe.

On va en faire du hachis de ces mecs.

Du tartare.
Des boulettes à couscous.

-J'aime bien ça,
moi, le couscous.

-Je t'offrirai un de couscous,
après la guerre.

Celui de l'Alma, tu connais?

-J'en connais un à Clichy, nickel.

-Eh ben, on ira à celui
de Clichy, si tu préfères.

Mais me les loupe pas, Béral.

Et magne-toi quand même un peu.

-Tu m'as dit:
"Prends ton temps."

-Pas toute la nuit.

Allez, Béral. Feu!

-Ton pote de l'Alma
met du poulet dans son couscous?

-C'est une hérésie,
le poulet.

-Mon pote de Clichy en met, lui.

-C'est un con, ton pote.
D'ailleurs, ça m'étonne pas.

-Ça y est, tu redeviens désagréable.

-Tu sais pourquoi l'adjudant
sera forcément d'accord?

Parce qu'il est intelligent.

Intelligent, donc réaliste.

-Oh, si ça se trouve,
il a déjà pensé à tout ça avant nous.

-Hier soir, c'est quand même lui
qui est entré le 1er dans la banque.

Hein, Béral?

-Affirmatif.

-Vous parlez de moi?

-Ah!

-Oh, l'adjudant.

-De vous, de nous,

de ce qu'on fera plus tard…

De l'avenir, quoi.

-C'est important, l'avenir.

-Tenez, prenez Boissier.

Lui, son rêve,
c'est d'ouvrir un hôtel sur la côte.

Vous, j'en suis sûr,

vous glisseriez plutôt
vers le mirage agricole.

L'investissement betteravier.

-"L'investissement”?
Mais j'ai rien à investir, moi.

-Aïe, aïe, investir.

-Il appelle ça rien du tout, lui.
6 milliards divisés par 4.

-Et 12 balles dans la peau
multipliées par 3, ça fait combien?

-C'est peut-être pas
la bonne manière de compter, ça.

-Eh bien, c'est la mienne,
point final.

Je vous donne l'ordre
de déposer vos armes.

-Y a pas d'ordre,
mon vieux Mahuzard.

Plus de sergent, plus d'adjudant.

Nos galons, on les a enterrés
avec nos morts.

C'est fini, tout ça.

On forme une coopérative.
Vous savez ce que c'est?

-Et vous, vous savez ce que c'est,
qu'un peloton d'exécution?

-Pour l'instant, Édouard,

le peloton d'exécution,
c'est moi qui l'ai en pogne.

-Vous êtes restés trop longtemps
au soleil ou quoi?

Vous n'espérez pas que je vais
vous aider à dévaliser une banque?

Les conneries, ça se fait avant
d'entrer à la légion, pas pendant.

-Pardon, moi, je suis pas limité
dans le temps.

Je suis pas légionnaire.

-Écoutez-moi, vous deux.

Vous savez comment ça s'appelle
ce que ce con-là gamberge?

Un hold-up.

-Permets-moi de te dire que tu parles
de ce que tu connais pas.

Un hold-up, c'est plein de fureur,
de cagoules et de flingues.

Nous, on ne braque personne.
On ne menace même pas.

On rafle l'or de la France
avant que les Allemands ne le pique.

Pas possible que le côté patriotique
de la chose t'échappe!

-Et vous allez l'ouvrir comment,
votre coffre, bande de tarés?

Avec une clé à sardine?

Un tire-bouchon?

-Je vais te dire
ce que je pense, Édouard.

C'est pas beau,
de rire des ennuis des autres.

C'est pas beau.

-Messieurs,
je ne vous espérais plus.

Depuis 2 jours,
la ville a été évacuée,

et moi-même, je m'apprêtais à partir.

Vous arrivez à temps.

Ah… Je m'appelle
François Laroche-Fréon.

Je suis le directeur de cette banque.

Enfin, de ce qu'il en reste, quoi.

-Adjudant Mahuzard du 1er bataillon
de marche de la légion étrangère.

-Enfin, de ce qu'il en reste.

-Nous avons pour mission de convoyer
vos réserves d'or vers l'arrière.

-Sait-on encore
où est l'arrière?

-À Sfax, provisoirement.

-Oui. Oui, non,
mais je plaisantais. Je…

Je suis parfaitement au courant.

J'attendais
un certain capitaine Schlotzer.

C'est bien ça, je crois, Schlotzer?

-Le capitaine est tombé
sous les balles allemandes.

-On a entendu une terrible fusillade.

-Nous étions dessous.

-Et alors,
les coups de canon de cette nuit?

-Cette fois, c'est les Allemands
qui étaient dessous.

Des histoires de soldats.

-Ah non, pas ce mot-là.
Pas vous.

Vous n'êtes plus des soldats,
vous êtes des voleurs.

-Allons. Voilà que ça le reprend.

C'est son pal...

L'adjudant est un vieux baroudeur.

Il était à Narvik, Trondheim,

il a fumé l'opium,
forniqué à droite et à gauche.

-Il marche sur les talons.

-Ces messieurs se sont mis
dans le crâne de piquer l'or…

-Légionnaire!
-Sergent!

-Pour avoir tenu
des propos antimilitaristes,

de caractère à saper
le moral des civils,

l'adjudant Mahuzard
est aux arrêts. Bouclez-le.

-Où ça?

-Dans les chiottes,
dans la cave, où tu veux.

-Viens un peu ici, salopard!

Mais tourne-toi, pédé!

-Vous entendez ça, les gars?
Qu'est-ce qui lui prend?

-Pose donc ton fusil,
la terreur de Levallois.

-I! croit que j'ai besoin d'un fusil

pour me farcir
un péquenot du Loir-et-Cher.

Brigadier!

-Sergent?

-Pose ton cul
sur cette chaise,

et ne bouge plus.

-Et s'il essaie d'enfoncer la porte?
-Tu tires en l'air.

-Et s'il l'enfonce?
-Tu tires dedans.

-Affirmatif.

-M. le directeur,
où en étions-nous?

-Eh bien, je crois que…

Je crois que l'adjudant…

-Vous voulez dire le prisonnier.

-Enfin, oui, si vous voulez.

Je crois que le prisonnier

venait plus ou moins
de vous traiter de voleur.

-Ne me dites pas
que vous l'avez cru.

-C'est-a-dire…

-De toute façon, la situation
a considérablement évolué.

Je la résume.

Des légionnaires sont envoyés
sous les ordres d'un capitaine

à El Ksour pour convoyer
vers l'arrière des fonds.

Deux, le pitaine est tué

Trois, l'adjudant devient fou.

Quatre, reste dans le grade
le plus élevé,

le sergent Augagneur.

Cinq, M. Laroche-Fréon
ouvre le coffre.

-Voyez-vous, sergent,
dans notre forme de société,

il y a ceux qui gardent les banques
et ceux qui les attaquent.

Je fais partie de la 1re catégorie

et je crains qu'il en soit trop tard
pour en changer.

-Il commence à me gonfler.
Pas toi?

-Oui, un peu.

-Laisse-moi faire.
Il va cracher le chiffre.

Moi, je te le dis.

Pousse-toi, que ta cervelle
éclabousse pas le sergent.

Allez, pousse-toi de là, je te dis.

Ma parole, si à 10 t'as pas parlé,

t'as plus de tête.

1, 2,

3,

4555

61

7,8,

9... 10.

Eh merde!

-Faut jamais promettre
quand on est pas sûr de tenir.

-Dis donc, sergent,

quelqu'un a pensé à la bouffe?

-Boissier proposait de la cervelle
comme plat du jour.

-C'est ma femme qui s'impatiente.

-Comment? Madame était là?
Et vous le disiez pas?

-Je vous signale
pour votre information

que mon épouse ignore
le chiffre du coffre.

-Ah bon?

Mes respects, madame.

Sergent Augagneur du 1er bataillon
de marche de la légion étrangère.

-Hélène Laroche-Fréon.
Mon mari en a encore pour longtemps?

-Je ne pourrais pas vous le dire.

Y a 2 secondes,
il avait un revolver sur la tempe.

Et si j'avais pas eu
mon subordonné bien en main,

à l'heure qu'il est, vous seriez
Mme veuve Laroche-Fréon.

-Je n'ai rien contre le principe.
Mais quel était le problème?

-Les choses se sont passées si vite
que moi-même, je m'y perds.

L'adjudant a crié au voleur,

votre mari a dit
"Je suis le gardien de la banque"”,

mon subordonné a sorti son revolver
et a dit:

"Je vais lui faire sauter
la cervelle, à ce con.”

Excusez-moi, je cite.

La-dessus, coups de klaxons,

votre mari a dit: "Ma femme.”

J'ai dit:
"Bougez pas, je m'en occupe."

Et me voilà.

-Sergent?

Pendant que vous y êtes,
demandez à madame

si elle aurait pas chez elle
un bout de saumon ou de quiche.

-Ou un homard Thermidor
ou un pain de 2 livres…

De quoi nourrir
une poignée de braves.

-Allez, montez.

Si vous voulez entrer
un instant au salon.

Je vais essayer de vous racler
quelques fonds de placard.

-Voulez-vous que je vous dise,
sergent Augagneur?

-Oui?

-Cet entêtement

de mon mari, même un fusil
sur la tempe, ne m'étonne pas.

C'est un homme
qui a toujours dit non.

Un malade du refus.

La seule fois où il aurait
vraiment dû dire non,

eh bien, cet imbécile a dit oui.

C'était il y a 10 ans,
à la mairie du 16e arrondissement.

À défaut du homard Thermidor,

est-ce que cassoulet,
corned-beef et un peu de vin

vous conviendraient?

-Mais parfaitement.

Et si vous vous souveniez
du code du coffre,

ça nous conviendrait encore mieux.

-Ah….

Mon cher sergent Augagneur

du 1er bataillon de marche
de la légion étrangère,

avouez que vous êtes venu
avec cette idée.

-Non. Je suis venu avec deux idées.

Ça, c'était la première.

Pour la deuxième,
vu l'état des lieux,

ça va pas être simple.

Faisable, mais…

pas simple.

-Mais qu'est-ce qu'il peut
bien foutre?

Je la saute, moi, hein!

-Augagneur, lui aussi, il la saute.

-Taisez-vous!
Qu'est-ce que ça veut dire?

-Que le sergent est en train
de culbuter Mme Laroche-Fréon.

Je peux même dire
comment ça s'est passé,

ça se passe toujours pareil.

-Vous n'avez pas le droit de parler
sans savoir, mon adjudant.

-Sans savoir?
Mais tout le monde sait.

Depuis que M. Augagneur
sert sous les drapeaux,

toutes les femmes de cocus
ont entendu le même refrain.

Le titi parisien, Gavroche,

l'école communale à Levallois-Perret,

la salle des fêtes
rue Anatole France,

et crac, les Fritz qui viennent
lui abîmer son paysage.

Ils installent la Kommandantur
dans son quartier,

le Roxy Palace transformé
en Soldaten-Kino…

Tu m'entends, Béral?

J'ai entendu pleurnicher
sous le préau de son école

en se farcissant

en levrette la femme
du préfet de Constantine.

Il faut oser, non?
Eh ben, lui, il ose, le fumier.

C'est ça, sa force.

-Y a un truc
qui m'a pris d'un coup.

Quand j'ai vu les Fritz
débouler à Levallois-Perret,

installer la kommandantur
dans la salle des fêtes,

débaptiser le Roxy Palace
pour l'appeler Soldaten-Kino,

mon sang n'a fait qu'un tour.

Je me demandais pas
si je voulais refaire l'Europe.

Mais il y a une chose que je savais,
une seule.

En débarquant à Levallois,

ils me faisaient chier, moi,
Augagneur, né 18 rue Anatole France.

Et à partir de ce moment,

je me voyais les réexpédier presto
"Unter den Linden",

sous les tilleuls, comme ils disent.

-Et vous vous êtes engagé
comme ça?

-Oui, madame.

-Pourquoi la légion?
Vous n'êtes pas allé au plus facile.

-Je suis allé
au plus propre.

*Édith Piaf: "L'Accordéoniste".

*-C'était Édith Piaf,
l'Accordéoniste.

-Béral, tu m'entends?

-Oui. Qu'est-ce que vous voulez?

-Moi, personnellement, rien.

Mais tu crois pas
que tu fais une connerie?

-C'est pas les gardiens, les cons,
mon adjudant. C'est les taulards.

Moi, je me suis jamais senti
aussi intelligent.

-Dis-moi, l'intelligent.

Tu t'imagines quand même pas,
pauvre connard,

que l'or de l'Afrique va devenir
la propriété du brigadier Béral?

Tu crois pas que tu rêves un peu?

-Vous savez, mon adjudant,
les rêves, c'est l'affaire de chacun.

On est dans la boucherie
de père en fils,

alors forcément, on rêve en boucher.

Et cet or, pour moi,
c'est une super boucherie.

Je sais même où elle sera,
j'ai repéré l'endroit.

Rue François 1er.

Chrome et nickel,
elle sera, ma boutique.

Alors marbre blanc par terre,

plafond décoré par Oudinot,

le fameux animalier,

alors têtes de bœufs,
de veaux, de moutons,

et puis la tête de ma femme,
Mme Béral…

Pas au plafond, hein. À la caisse.

Émilienne, l'impératrice
du palais de la viande.

Après l'Armistice, il faudra passer
nous dire un petit bonjour, hein.

-Quel âge elle à, ta femme?
-29.

-Ah ben, tant mieux.

Comme ça, elle pourra refaire sa vie.

-Qu'est-ce que ça veut dire?

-Ça veut dire que les guerres,
ça se termine un jour.

Et je suis pas sûr
que ça soit au palais de la viande

que j'aille te dire bonjour,
mais plutôt au palais de justice.

T'as entendu parler du tribunal
permanent des forces armées?

-Ben, je... Non.

-Et du code
de justice militaire?

-Euh… Non.

-Désertion avec complot,
en présence de l'ennemi,

outrage et voies de fait
envers ses supérieurs,

vol avec effraction…

Quand tu additionnes tout ça…

ça donne au moins la peine de mort
et la dégradation militaire.

Et puis, un matin, à l'aube,

on vient te réveiller
dans ta cellule,

on te traîne sur un petit terrain
derrière la prison,

et là, on te bande les yeux,

et dans le noir, t'entends:

"Épaulez, armes!

"En joue! Feu!"

T'es toujours là, Béral?

-Affirmatif, mon adjudant.
Affirmatif.

-J'ai oublié de te dire.

9 fois sur 10, t'es pas mort.

Troué comme une écumoire,
mais pas mort.

Alors y a le coup de grâce
qu'on te tire à 5 cm du crâne,

en dessous de l'oreille.

Comme aux abattoirs.

Ça doit te rappeler
quelque chose, ça.

-Vous avez rien oublié, cette fois?

-Ah ben, si.
Juste après l'exécution,

les troupes défilent
devant le cadavre.

-Ah, tout de même.

-Merde! Il a pas dû
tomber loin, celui-là.

Je vois rien.

Viens au 1er. On verra mieux.

-Hélène!

Hélène!

-Je crois qu'on t'appelle.
Tu le connais?

-Mais bien sûr. On les a eus
pendant 2 mois sur le dos.

-Heureusement
que t'as les reins solides.

-Hélène!

Hélène!

Hélène!

-Arrête!

Tu es fou ou quoi?

Je ne te demande pas de me faire
le coup du balcon et de l'échelle,

mais ton coup de canon
et tes plaisanteries,

ça fait peut-être rire tes chefs,
mais pas moi.

-Mes chefs?
Il n'y a plus de chefs.

Je les emmerde, mes chefs.

J'ai fait 200 km pour te voir,
madame Laroche-Fréon.

Tu es contente?
-Très.

-Alors, embrasse-moi.

J'ai beaucoup pensé
à ce que tu m'avais dit

à propos de l'or.

Tu avais raison,
il faut pas le laisser là.

-On n'a pas l'intention
de le laisser là.

Sois tranquille.

-Qui c'est, celui-là?
-Un ami.

Sergent Augagneur du 1er bataillon
de marche de la légion étrangère.

Lieutenant Karl Breiner,
de la 21e Panzerdivision.

-Pardon.

Si le lieutenant veut bien
mettre les mains dans le dos.

-Dis donc…

Quand tu l'auras ouvert, ce coffre,

à condition que tu l'ouvres,
où iras-tu avec ton or?

-Je sais pas.
Au Niger ou en Lybie.

-Et tu le cacheras où?
Au pied d'un arbre?

-Tu me prends vraiment
pour une truffe.

Je trouverai un endroit.

-Admettons.

Mais comme tous les objets d'art
et les bêtes de race,

l'or a un pedigree,
n'oublie jamais ça.

Les barres sont numérotées,

les numéros seront communiqués
à tous les banquiers, aux flics,

et avant de le mettre en circulation,
il faudra attendre,

peut-être longtemps.

Tu feras des rêves de milliardaire
en vivant comme un clochard.

Un jour, t'en auras marre
et pour faire semblant d'exister,

tu raconteras ta vie à des putes,

des barmans.…

Dans 6 mois, 1 an,
on te retrouvera égorgé

dans une cave, dans un hangar,
à Khartoum ou à Benghazi.

-Ça, c'est l'hypothèse la plus gaie.

T'en as sûrement une autre.

-Quand mon mari
était à Tunis,

nous fréquentions
un certain Bob Turner.

-C'est le Turner
dont tu m'as parlé?

-C'est plus à toi que j'en parle,

maintenant!

Bob Turner est au Liban en ce moment.

Son job, c'est la monnaie.

Dans certains milieux,
on l'appelle le blanchisseur.

Il peut laver l'or de la banque

comme il lave celui de la mafia
depuis des années.

Quand le métal jaune sera devenu
du beau papier vert,

y aura plus qu'à faire part à 3.

-Comment tu comptes?

-Turner, toi et moi.

-Et mes potes?

-Tes potes, comme tu dis,

chez le juge d'instruction,
ça s'appelle des complices.

Et pour peu que ça tourne mal,

les complices peuvent devenir
des témoins oculaires.

Et des témoins, il en faut pas.

-Tu veux pas liquider
tout le monde?

-Tout le monde.

-Oh, ben, dis donc!
Pas ton mari, quand même?

-J'ai dit "tout le monde".

Qu'est-ce qu'il y a?

-Je comprends pas.
Qu'est-ce qu'une femme de ta classe,

je veux dire
avec un cerveau et un cul pareils,

peut bien fabriquer
dans un bled comme ça?

Voilà le ravito, les gars.

Y a plus qu'à mettre le couvert.

Et qu'on prépare une cellule
pour le prisonnier.

-Nous nous sommes inquiétés,
ma chérie.

-Mais il n'y avait vraiment pas
de raison, mon chéri.

-Mais qu'est-ce que ça veut dire?

Personne ne garde plus personne?

Merde! Où est Boissier?

-Il est à la cave, Boissier.
Mains sur la tête

ou je tire.

-En ce qui me concerne,
ça me paraît tout à fait impossible.

-Où tu l'as trouvé, celui-là?

-Lieutenant Karl Breiner,
de la 21e Panzerdivision.

-Comment avez-vous été
fait prisonnier?

-Je l'ai rencontré sur la route.

Il m'a demandé si je connaissais
l'adjudant Mahuzard.

J'ai dit: "J'ai l'honneur."
Il m'a dit: "Pas possible?"

J'ai dit: "Si."

À l'école de guerre,
on ne parle que de toi.

-Mahuzard, il t'emmerde!

Alors tu vas commencer

par fermer ta gueule
et descendre au trou,

parce que tu fais chier
tout le monde.

Allez, passez devant, vous.

-Un moment.

J'ai oublié de te dire, Béral.

Tu sais ce que t'es?

Une glaire. Un étron.

Un artilleur.

-Racontez-lui le coup de grâce,
mon adjudant.

-Tu n'as pas été
lui raconter ton vieux truc?

-Je racontais
le tribunal militaire à monsieur

pendant que tu racontais la rue
Anatole France à madame.

Faut bien s'amuser.

Allez, avance.

Stop.

Entrez là-dedans.

-Alors…

Qu'est-ce que tu penses
de la situation?

-Elle ne peut que s'améliorer.

-Ce qui m'inquiète, c'est pourquoi
il est revenu à El Ksour, le Fritz.

-Eh ben, t'inquiète plus
pour ça, Béral.

-Et qu'allez-vous faire du sergent?
-Qu'est-ce que ça peut te foutre?

Il a dit ce qu'il pensait de toi.
M'oblige pas à le dire aussi.

-Ça retombe sur moi,
maintenant.

-Ne faites pas attention, brigadier.

Après avoir été longtemps
des héros de Courteline,

les adjudants deviennent
des personnages de Freud.

C'est pas après vous qu'il en à,
c'est après lui.

-C'est jamais marrant
de mettre un fauve en cage.

-Un fauve que vous traitiez

de charognard.

-Écoutez, M. Laroche-Fréon,

malgré tout le respect
que je vous dois,

ça me fait chier
de parler d'Augagneur

avec un civil.

Parce que ce charognard,

quand il commandait la 11e section
antichars sur la ligne Mareth,

je l'ai vu faire
des coups pas croyables.

-Moi, je peux vous raconter
le coup de ce matin.

-Il est extra, votre bœuf.
Hein, Béral?

-Oui, il est bon.

-Pardonnez-moi
de ne pas l'avoir servi chaud.

-Ça serait nouveau.
Voilà 10 ans que je mange froid.

-Sauf quand tu dînes
chez ta poufiasse.

-Crois-tu
que ça intéresse messieurs?

-Mais certainement, mon chéri.

Quand l'armée n'est pas là,

le coin manque singulièrement
de distraction.

Bien sûr, y a le bridge du samedi
chez l'ingénieur hydraulicien.

-Je sens qu'il va être
question de Gilberte.

-Mais de Gilberte
et de Jean-Pierre.

Parce qu'il faut vous dire

que les maîtresses de mon mari
sont les femmes de mes amants.

-Où est le pinard, brigadier?

-La main dessus, mon adjudant.

-On pourrait se croire

chez les bourgeois de Passy.

Nous avons, Dieu merci,
la version exotique.

Et là, vous allez voir.

On passe de la rue du Ranelagh
à la cabane bambou.

-Hélène, tu ne crois pas
que tu pourrais t'arrêter?

-C'était il y a 10 ans
qu'il fallait s'arrêter, mon cher.

Tenez.
À votre avis, vertueux militaires,

que penseraient ces vertueux clients

s'ils savaient que le vertueux
directeur de la banque

envoie sa vertueuse épouse

arpenter le trottoir
du quartier indigène?

-Chère petite fille,

puisque nous en sommes
aux confessions publiques,

ce trottoir dont tu parles
ne serait-il pas une sorte

de retour aux sources?

-Élégant, ça. Très élégant.

-Où allez-vous, madame?
-Ben, en bas.

Pour que vos taulards
finissent au poteau,

vous pouvez pas les laisser
mourir de faim.

D'accord. Mais les taulards,
c'est pas les invités.

Ça ira comme ça.

Dis donc, Roméo.

Tu savais que ta Juliette faisait
des passes dans la Médina?

-Je crois qu'on te cause.

-Qui ça?
-L'enfoiré mondain.

-Dis-lui d'aller se faire…

-Tiens, puisqu'on parle de ça.
Tout le monde te félicite.

T'as été sensass, ce matin.

-Ta bouffe,

tu peux te la carrer au train.

-Vous allez vous jeter dessus
dès que j'aurai tourné le dos.

Vous verrez…

Quand vous serez en forteresse,
vous le regretterez,

le cassoulet du bon Mahuzard.

Pour la soif,

vous n'aurez qu'à pisser
dans la boîte.

-C'EST À LA RAIE QU'ON TE PISSE!

Dis donc, mec. C'est vrai
que t'as dû être super, ce matin.

-Vous pouvez aller préparer
le fourgon, messieurs.

-Allez, arrête de rêver.

-Oui.

-Béral, range les rails.

Si ça ne vous ennuie pas,
vous roulerez devant.

Comme ça, on verra ce qui se passe.

Si vous crevez
ou si votre bazar dégringole, là.

-Je me demande pourquoi
on emmène ces saloperies.

Je parle de celles
qu'il y a sur le toit.

-Bon. En route.

-Je vous demande
juste un instant.

-Nom de Dieu!

-Que s'est-il passé?

-Il a dû pisser
sur la ligne à haute tension.

Point final.

-Vous savez, ça s'est passé
tellement vite…

Il a pas dû souffrir du tout.

Du tout.

-C'est la première fois qu'il fait
des étincelles avec sa bite.

-On ne va pas le laisser là.

-Écoute-moi bien, Mahuzard.

Boissier va monter dans le fourgon.

Si tu ne bouges pas,
tout se passera gentiment.

J'ai ta parole, Mahuzard?

-Envoie toujours. Tu verras bien.

-Vas-y, Boissier.

Eh ben, voilà.

Comme ça, y a plus
que 3 témoins oculaires.

C'est comme ça
que tu les appelles, je crois?

-3, c'est pas un bon chiffre.

J'aimerais mieux un chiffre pair.

-La connerie que j'ai faite,
c'est d'envoyer Boissier.

Jamais j'aurais pensé
que Mahuzard tirerait.

-Eh oui.

Tu ne pensais pas
que mon mari garderait le coffre,

tu pensais que Béral
garderait Mahuzard,

tu pensais que Mahuzard
garderait son sang-froid,

et comme tu n'arrêtes pas
de te gourer sur les gens,

tu t'es trouvé un homme de confiance.

-Alors,
qu'est-ce que vous avez décidé?

Qu'est-ce qu'on fait?

-Oh, on n'a rien décidé de précis.

Hélène pense qu'on devrait te buter.

-J'espère que t'as dit non.

-J'ai dit ni oui ni non.
Je réfléchis.

-Tiens. Ça va peut-être
t'aider à réfléchir.

Ici, tu as les Américains.

Là, tu as les Français et les Anglais
qui foncent sur Tunis.

Là-haut, tu as les Italiens,
et là, l'Afrikakorps.

Qui recule,
mais qui reste opérationnel.

Avec un peu de chance,

en piquant au sud,

on longe le Jebel Tiaocha,

on rase les moustaches de Rommel

et on arrive à Batahoua.

Et là, mon ami,

je te présente la plus belle crapule
que le monde ait connue.

Al Sid Kalouendé.

Ça vous dit rien?

-Tu parles de l'illuminé
du Bouganda?

-Pourquoi illuminé?

Al Sid a fait croire
à 2 millions d'adeptes

plus tous les sorciers
de l'Afrique occidentale

qu'un jour, il monterait au ciel,
de son vivant!

En attendant le jour
de l'ascension, il bricole.

Il y a 5 ans, il s'est lancé
dans la fabrication des hosties.

À l'heure de la communion,
ses églises étaient bourrées.

Tu sais ce qu'il y avait
dans ces hosties?

De la cocaïne.

J'espère que t'as confiance,
maintenant.

-J'avoue que c'est encourageant.

-En somme, on abandonne
ma filière Turner?

-Ta filière Turner
est à 5000 bornes d'ici.

Où penses-tu trouver
le carburant, connasse?

-Dis donc, tu pourrais peut-être

demander à ton chauffeur
de modérer ses expressions.

Il nous accompagne comme chauffeur,
pas comme associé?

-Ça, c'est comme monsieur voudra.

D'ailleurs, monsieur a bien failli
ne pas venir.

-Pourquoi tu l'as pas fait?

-Je le ferai peut-être.
Je suis comme toi, je réfléchis.

-Voici la minute d'émotion,
mais pas d'attendrissement.

Madame Laroche-Fréon,
vous avez fait votre part de travail,

vous avez votre part

de gâteau.

-Ma part?

C'est ça que t'appelles ma part?

Vous embarquez 10000 kg d'or,
vous m'en laissez 300,

et t'appelles ça ma part,
espèce d'enfoiré!

-Madame Laroche-Fréon, oublions
les questions d'argent, voulez-vous?

Nous allons nous enfoncer
dans l'Afrique noire.

Dans l'empire des caïmans
et de la mouche tsé-tsé.

Croyez-vous que ce soit
la place d'une fille?

Je vous le demande, ma mie.

-Prêt!

-Excusez-moi,
le devoir m'appelle.

Allez.

Ohé!

-Allez vous faire foutre,

bande de pédés et de salopes!

J'espère que vous crèverez!

Que vous crèverez!

Que vous crèverez!

-Je dis pas
qu'elle est facile à vivre.

Je te dis qu'elle a un beau cul.

-Il fallait l'amener.
Que veux-tu que je te dise?

-Ça s'est passé comment,
l'occupation à El Ksour?

-Hélène ne te l'a pas dit?

-C'est à toi que je le demande.

-Si j'avais pas peur
de te vexer,

je te dirais qu'une occupation,
ça se passe toujours bien.

Vous, forcément,

vous avez perdu l'habitude.

Depuis quand t'as pas été à Paris?
-4 ans.

-Moi, j'y étais il y a 3 semaines,
en permission.

Si la conversation te gêne,
tu me le dis.

-Mais non.
C'est devenu comment, Paris?

-Ah, Paris, ça sera toujours Paris.
Folies Bergères,

zig-zig mademoiselle,
Maurice Chevalier,

les petites femmes de Pigalle…

-Je crois qu'Hélène avait raison.
J'aurais dû te buter.

*-Les longues files de prisonniers
allemands et italiens

préfigurent l'issue finale
de la victoire.

Tandis que la 8e armée
tient la branche sud de la tenaille,

au nord, le 9e corps britannique
et le 19e corps français

viennent de lancer
leur ultime offensive.

C'était notre 9e bulletin
d'information.

-Dis donc, comment on dit
"Zig-zig mademoiselle” à Berlin?

Parce que j'ai l'impression
qu'on va y être bientôt.

-Si c'est Berlin que tu visais,
il fallait me le dire.

Parce qu'on n'est pas
dans la bonne direction.

Bon.

En attendant, il faut qu'on dorme.
Je prends le 1er tour de garde.

À quelle heure tu veux
que je te réveille?

-Si ça te fait rien, tu dors le 1er.
Moi, j'ai pas sommeil.

-Dis donc, Pierrot.

J'espère que tu n'as pas cru
que j'allais te buter.

-J'ai dit quelque chose
qui peut te faire croire ça?

-T'as raison.

Plus vite on y sera, mieux ça vaudra.

Il vaut mieux faire le plein
dès qu'il fera nuit.

-Ça biberonne drôlement,
ce truc.

On aurait mieux fait
de prendre un chameau.

-Là, il y a de quoi ravitailler
toutes les divisions d'Afrique.

En cas d'inspection, il vaut mieux
qu'on te trouve pas dans le char.

Alors tu descends ici.

-Oui?

-Je te récupère à la sortie du camp.

-C'est ça.

Et si tu m'oublies, je fais du stop.

Vous n'iriez pas par hasard
à Levallois,

chers camarades?

-Tu te méfierais de moi, Pierrot?

-Qu'est-ce que tu vas chercher?

Je me méfie de personne, Karl.

Mais s'il te venait à l'idée
de réintégrer la 21e Panzerdivision

et de faire marron
le légionnaire Augagneur,

ton ami Pierrot
te ferait péter la gueule, verstehen ?

-Vous parlez français?
-Un petit peu.

-Ça suffira.

-Je peux comprendre
ce que vous faites?

-Tu vas comprendre
tout de suite, mon petit.

Alors, voilà.

Tu portes sur toi de quoi
faire sauter une partie du camp

et la totalité de ta personne.

Alors tu vas sortir gentiment,
tu vas marcher jusqu'au bout

de la barrière, là, tu t'arrêtes,

et tu cries à tes hommes:
"Tout est en ordre.”

Je sais comment le dire en allemand.

"Alles in Ordnung.”

Pendant tout ton trajet,
je vise ou ta poitrine ou tes fesses.

Et si tu dis autre chose que ça…

Fais voir. Rien qu'à voir ta gueule,
je vois que t'as compris.

Allez.

-Avec un sous-titre,
qu'est-ce que ça donne?

Tu vois, si j'avais pas sauté
sur le tank, hier soir,

quand t'as oublié de t'arrêter,

eh ben, t'aurais pas l'immense joie
de m'avoir près de toi, cher Karl.

Qu'est-ce que tu disais,
quand tu te croyais tout seul?

-Je disais que ça ne peut pas
être la mer.

La mer, on devrait
l'avoir dans le dos.

-Pour avoir la mer
dans le dos…

tu retournes la carte.

Tu retournes le tank.

C'est ce que je vais faire.

Mais sans toi.

Allez, descends ou je tire.

-Ça veut dire quoi?

-Ça veut dire
que la guerre est finie pour toi.

T'es démobilisé.

Et comme t'as plus besoin
de ton uniforme,

tu vas me le refiler,
en souvenir de notre fidèle amitié.

-Mais arrête! Tu es fou ou quoi?

-Je te préviens, la prochaine fois,
le tir sera continu.

Non, non.

La croix aussi.

-Je crois que tu es en train
de te gourer.

C'est pas une affaire
qu'on peut faire tout seul.

-Mais je la fais pas tout seul.

-On peut savoir qui c'est, l'autre?

-Mais ton pote AI Sid.
AI Sid Kalouendé.

-T'es un beau fumier.

-Alors, ça, c'est un comble.

Je te laisse au soleil,
sur une belle plage d'Afrique,

pendant que je continue
mon dur métier,

et tu me traites de fumier?

Ah, j'aime mieux me tirer
que d'entendre ça.

-Vous avez l'or?

-Vous avez l'argent?

-Où ça?

-Dans un vrai coffre,
dans une vraie ville,

avec de vrais flics
et une vraie banque.

-Parfait.

Alors, comment on procède?

-Vous avez perdu Karl en route.

C'est dommage, je l'aimais bien.

-Il avait aussi
beaucoup d'estime pour vous.

Il m'a dit: "Quand on arrivera
à Batahoua, mon ami,

"je te présenterai
à Al Sid Kalouendé,

"la plus belle crapule
que la terre ait connue.”

-Il a dit AI Sid Kalouendé?

-Il a dit AI Sid Kalouendé.

-Et tu es déçu?
-Non. Surpris.

Al Sid Kalouendé, ça va pas tellement
bien avec l'accent américain.

-Si tu crois que ton uniforme va bien
avec ton accent de Belleville.

-L'honnêteté n'a pas de patrie.

Je serai là demain matin
avec la somme convenue,

moitié en dollars, moitié en…

-Non. Tout en dollars.

Alors, 68000 dollars,
un thermos de thé et 3 croissants.

Et comme je dormirai très fort,

tu taperas très fort là-dessus.

Ou alors tu t'approches
tout doucement,

et t'imites le cri
des billets de 100 dollars.

-OK. Je serai là.

-Sergent Augagneur du 1er bataillon
de marche de la légion étrangère.

-Pour sergent Augagneur,
hip, hip…

-HOURRA!

-Hip hip hip…
-HOURRA!

-Hip, hip, hip…

-HOURRA!

Clairon

-Reposez, armes!

Repos!

-En avant, marche!

-Sergent Augagneur?

-Mon général?

-Madame Chantrel,
je vous présente le héros du jour,

le sergent Augagneur.

M. Chantrel, président de l'Union
des banques de l'Afrique du Nord.

-Dont la reconnaissance
vous est acquise.

Sais-tu, ma chérie,
qu'on lui est redevables

de 6 milliards.
Enfin presque.

-Mon Dieu!

Quand on n'est pas un homme d'argent,
il y a des chiffres qui étourdissent.

-J'espère que le sergent
a été remercié selon ses mérites.

-Les remerciements
appartiennent aux civils.

Les militaires, eux,
honorent ou punissent.

-Et quelle punition
avez-vous prévue?

-Elle sera proclamée demain
sur le front des troupes.

"Le sergent Augagneur
de la légion étrangère

"est cité à l'ordre de l'armée

"pour son fait d'armes à El Ksour,

"au cours duquel il à,
au péril de sa vie,

"sauvegardé les avoirs de la France.

"Sa conduite courageuse…”
Oui?

-Excusez-moi, mon général,
mais au lieu de "courageuse”,

j'aimerais mieux "héroïque".
Ça ferait plaisir à maman.

-Si vous voulez.

"Sa conduite héroïque
a renversé une situation

"où le sort de nos armes
était gravement compromis."

-Merci, mon général.

-Sergent Pierre Augagneur.

Vous avez un nom
bien joliment français.

Vous êtes de Paris?

-Mieux que ça, madame.
Beaucoup mieux.

Je suis de Levallois.

Vous voyez la rue Anatole France?
-Oui. Enfin, vaguement.

-Alors vous voyez
le Roxy Palace?

On avait un appartement au-dessus.

On entendait King Kong rugir
dans la salle à manger.

Quand Hitler a transformé
mon Roxy en Soldaten-Kino,

mon sang n'a fait qu'un tour.

Je me suis dit: "T'as plus rien
à faire ici, mon Pierrot."

-Et vous avez choisi
la légion.

-J'ai choisi le plus propre, madame.

-Laissez-moi contempler
un honnête homme, sergent.

Dans nos milieux,
ils sont plutôt rares.

-Le seul banquier que j'ai connu
est mort prématurément.

Il avait une femme ravissante.

X -Je m'attendais à "Il avait
une femme ravissante, celui-là".

-Pas "celui-là".
J'allais dire "lui aussi".

-Et on peut savoir
ce qu'est devenue sa femme?

-Oh, c'est horrible.

Son mari a été tué devant elle

dans des conditions tragiques.

Depuis, on l'appelle
"la folle du désert”.

Elle court à travers les sables

en disant des mots sans suite.

Il n'y a pas si longtemps,
elle m'a pris pour un autre.

-Un autre?

-Dans son délire,
elle voit des légionnaires

qui auraient détourné
un tank allemand

pour dérober l'or
d'une banque française.

Enfin, toute l'incohérence
d'un cerveau détraqué.

-Mais il faut faire
quelque chose.

Voulez-vous
que je prévienne le général?

-Oh non, madame.

C'est pas un militaire qu'il faut,
c'est un médecin.

Ça servirait à rien de la fusiller.

Il faut la soigner.

-Sergent Pierre Augagneur…

-Oui, madame?

-Tu sais que t'as des mystères
plein les yeux?

Alors,

baroudeur,
un fauve doublé d'un tendre,

ou simplement un romantique?

Dis-moi, qui es-tu?

-Tu veux savoir qui je suis?