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Le pharaon vient de mourir.

On a transporté sa dépouille
dans la grande pyramide.

Il repose le dos pris vers l'ouest
dans le monde des ténèbres,

mais regardant vers l'est,
prêt à renaître, comme Osiris,

chaque matin, avec le jour.

Il va pouvoir, à son gré, prendre
la barque du dieu du soleil

et remonter vers les étoiles,

morceau d'or à jamais impérissable,

flamboyant dans le ciel.

Remonte ta manche.

- En quoi tu es le meilleur ?
- En tout.

Mais je préfère l'histoire.
L'Antiquité.

Qu'est-ce qui t'intéresse
dans l'Antiquité ?

La vie des gens
il y a 5000 ans.

J'aurais préféré vivre
à cette époque-là.

Non, non.
Reste assis.

- Au revoir.
- Au revoir. Salut.

Ça va pas ?

Allez, venez.
Je vais vous raccompagner.

J'ai ma voiture.

Mais vous ne pouvez pas
conduire comme ça.

- Vous habitez où ?
- Rue Moulin.

Tenez.
Ça va vous faire dormir.

Céline, c'est vous ?

La fille du publiciste ?

Le Dr Chesnaud, s'il vous plaît.
C'est urgent.

"Affaire succession M. Giraud.

"J'abandonne toute part
de la succession de mon père,

"François Giraud,

"et ce sans utiliser le délai de
réflexion que vous m'avez conseillé."

Gérard, tu peux venir maintenant
au vieux moulin ?

Tentative de suicide.

Noyade et somnifères.

Non. Juste assez
pour dormir pendant longtemps.

Ne préviens pas la police.
Je t'expliquerai.

À tout à l'heure.

"Notaire : 45 20 18 12."

Bonjour. Pourrais-je avoir
Me D'Havré, s'il vous plaît ?

C'est au sujet de Céline Giraud.

Tu sais pourquoi elle a fait ça ?

- Le père Giraud...
- Le milliardaire ?

Il l'a recueillie à sa naissance.

Il l'a imposée à sa femme.

C'était la fille de qui ?

D'une de ses employées
qui est morte à la naissance.

Giraud a appris
qu'il était malade.

Il n'a rien dit. Il est venu ici,

et lui a tout déballé
avant de mourir.

Le choc a été tellement rude
qu'elle a renoncé à son héritage.

Elle est conne.

Quand son fiancé l'a appris,
il l'a plaquée.

- Tu as prévenu la famille ?
- Ils sont en pleine succession.

La mère va quand même venir.

Bon. Pour l'instant,

elle est en état de choc.

Ça peut durer des jours.

Il vaut mieux l'emmener à l'hôpital.

Voyons la mère.
Moi, je la garderai.

Et tes clients ?

Patricia fera un roulement

avec moi.

Tu te jettes dans l'eau glaciale
avec ton cœur malade ?

Qu'est-ce qu'elle a,

pour te mettre dans cet état ?

Rappelle-toi il y a 4 ans.

J'aurais bien aimé que quelqu'un
en fasse autant pour moi.

Alors, Poupoune !

Ta maîtresse est en retard,
et tu avais faim.

Voilà.

Bonjour.
Mme Houdrichon à l'appareil.

Vous pouvez passer
à 6 h au lieu de 7 h, demain ?

On a un ennui à la ferme.
Je dois y aller.

Rappelez pour confirmer.
Merci.

Votre portail,

- c'est vous qui l'avez fait ?
- Oui. Avec du parquet.

- "Avec du parquet" ?
- Et des travers de fer.

Moi, j'en ai à refaire,
dans ma maison.

Si vous voulez,
on ira voir tout à l'heure.

Je veux bien, oui.

- Ça revient cher ?
- Non.

Vous prenez du parquet...
de troisième choix,

avec des nœuds.

- Salut.
- Salut. Ça va ?

- Oui. Ça s'est bien passé ?
- Oui. Elle délire plus.

Elle regarde dans le vide
et n'ouvre pas la bouche.

- J'y vais.
- Elle a de la visite.

- Qui ça ?
- La mère.

Oui ?

Bonjour.

Bonjour, madame.

- Madame Giraud.
- Geneviève Tessier.

Bonjour, Céline.

Ça va mieux ?

T'en fais pas.
Ça va s'arranger.

Je peux vous parler ?

Bien sûr, oui.

Je préférerais sortir,
pour ne pas la fatiguer.

Bien.

Vous êtes infirmière
à domicile ?

Oui.

Bientôt, Céline ira mieux.

Mais elle aura besoin
d'une présence.

Vous êtes divorcée.

Votre maladie vous a contrainte
à un travail plus facile.

Accepteriez-vous
de vivre ici avec elle un moment ?

Vous pouvez continuer

à soigner vos malades.

Vous prendrez soin de Céline.

Aidez-la à reprendre ses études.
Vous serez bien payée.

On lui a laissé cette propriété
et une pension à vie.

Pas royale, mais confortable.

C'est tout ?

Je vois que vous êtes au courant.

Je l'ai élevée de mon mieux.

C'est elle qui refuse
sa part d'héritage.

Je ne pouvais pas accepter

de priver mes enfants
de leurs biens sans raison.

Et son fiancé, Olivier,
il l'aimait vraiment ?

Oui. Nos deux familles
espéraient beaucoup dans ce mariage.

Mais la situation actuelle
retire toute raison d'être

à cette union.

Tout perdre en deux jours,
à 22 ans,

c'est dur.

Moins qu'à 50.

J'ai besoin de vous.

Pourquoi tu es allée te cacher ?

J'ai mal.
Ça revient sans arrêt.

Je t'ai déjà vue comme ça.

Et même dans des états pires.

Rien de tout ça
n'a d'importance.

N'aie plus jamais honte
devant moi.

Je coule.

Aide-moi.

Chut.

D'abord, il faut rentrer.

- Au lit.
- Non.

Tiens.

Ça va te calmer.
Allez.

Tu restes là.
Allez, hop.

Essaye de raconter.

J'ai peur de dormir.
Ça revient sans arrêt.

Qu'est-ce qui revient sans arrêt ?

Mon père
qui est en train de mourir.

Il me dit que je suis pas sa fille.

Alors je me demande qui je suis.

Puis je demande son aide à Olivier,
et il me laisse tomber.

J'ai l'impression
de ne plus exister.

Je voudrais être morte.

Va donc t'allonger.

Non.

Quand je dors,
j'ai rien pour me défendre.

Avec tout ce que je t'ai donné,
tu vas dormir jusqu'à demain.

- T'es sûre ?
- Mais oui.

Je voudrais arriver
à ne plus penser.

Bonjour, Céline.

Alors, Poupoune...

Elle a dormi avec toi ?

Moi aussi, une fois, j'ai eu
l'impression de n'être plus rien.

Et j'ai cru
que j'arriverais plus à vivre.

J'ai essayé de me tuer.

Tu sais ce qui m'a arrêtée ?
Le chat.

Il risquait d'y passer aussi,
et c'était pas juste.

Alors j'ai laissé tomber.

Tu te lèves ?
Je vais faire ton lit.

Allez, tu la prends ?

Tiens.
Pour que t'aies pas froid.

Si on m'avait dit
que je reprendrais

goût à la vie...

Et tu sais le plus drôle ?

Je me croyais la seule malheureuse
au monde.

Et quelque chose en moi
en était content,

et me forçait à me punir.

Le spectacle de mes malades
m'a changée.

Je me suis vue comme de l'extérieur.

Ma douleur était devenue
comme celle des autres, banale.

Mon orgueil en a pris un bon coup.

Et ça m'a aidée à guérir.

Tu peux te recoucher.

Il y a du soleil.
On va aller dehors.

Olivier...
Je savais que tu reviendrais.

C'est ta mère qui...

Je sais pas quel mot employer.
Ta mère ou Mme Giraud ?

Emploie le mot exact.

Mme Giraud
a fait livrer toutes tes affaires.

- Tu faisais des études de droit ?
- Oui.

Tu t'es occupée de moi ?

Oui.

Mais maintenant, Mme Giraud
me paie pour ça.

Mais toi, tu m'acceptes ?

Ça doit être pour moi.

J'ai donné le numéro
aux malades importants.

- Geneviève ?
- Oui ?

Merci.

Allô ?

Elle a fait une allergie sévère,
probablement aux acariens.

Donnez-lui du sulfate de magnésie
en intraveineuse.

Faites attention.
C'est une malade très allergique.

Le sulfate de magnésie
doit être fait très lentement.

Vous allez faire une première
injection très lente en test.

3 minutes minimum.

Si elle a des démangeaisons
ou qu'elle a chaud,

immédiatement,
vous arrêtez l'injection.

C'est compris ? Soyez prudente.
Surtout, faites attention.

Le sulfate de magnésie
peut avoir des effets secondaires.

Enfin...

Écoutez, je vous rappellerai.
Au revoir.

Sherman Act...

Si je comprends bien,
tu n'as pas avancé.

Tu n'arrives pas à te concentrer ?

Tout ça, je m'en fous.

La seule chose, c'est que j'ai mal.

Donne-moi un cachet.

Je ne te donnerai plus
ni somnifère, ni calmant.

Quand tu voudras guérir,
je t'aiderai.

D'une autre façon.

Tu n'as pas déjeuné ?

Aide-moi.

Je vais reprendre mes patients.

Le matin et le soir,
je ferai ma tournée,

l'après-midi, je les recevrai

- chez moi.
- Pourquoi pas ici ?

La maison est assez grande.

Si tu veux.

Toi, tu m'aideras.

Tu te lèveras à 6 h 30,

tu feras ta toilette, ton lit,
ta chambre soigneusement.

On va se mettre au régime.

Tu feras les commissions.

Tu sais faire la cuisine ?

Pas très bien.

- Pas du tout, même.
- Tu apprendras.

Je vais installer mon répondeur,

mais j'aimerais que tu répondes
aux malades et que tu les reçoives.

Je croyais que tu devais m'aider.
Pour l'instant,

je suis que ta bonniche.

Je croyais
que tu voulais n'être plus rien.

Ne plus exister.

Voilà.

- Tu as rangé ta chambre ?
- Oui.

- Tu es sûre ?
- Oui.

- Tu fais quoi ?
- Je sers à rien. Je m'en vais.

C'est ce que tu veux ?

Alors fais ce que je te dis
sans poser de questions,

même si tu comprends pas
à quoi ça sert.

Tu te reposeras plus tard.
Viens.

Pourquoi t'es si dure avec moi ?

Dépêche-toi.

Ne pense plus à rien.

- Si tu crois que c'est facile.
- Calme-toi.

Laisse les pensées venir
tout doucement.

Mais essaye
de ne pas y adhérer.

J'y arrive pas.

À quoi tu penses ?

- Toujours pareil.
- C'est-à-dire ?

Mon père est en train de mourir.
Il souffre.

Je suppose que c'est M. Giraud
que tu évoques.

Il est mort et enterré.

Son corps n'est plus rien.

C'est une chose,
comme un morceau de bois.

Un jour, il ne sera plus
que de la poussière.

Reste là.

Pourquoi cette cruauté ?

Ce n'est pas de la cruauté.

Cet homme est mort.
Il ne souffre plus.

C'est toi qui souffres.

Le problème, il est en toi.

Si tu crois que je le sais pas...

Mais j'y peux rien.

Si tu en parles,
ça fait déjà moins mal.

Reviens t'asseoir.

Ferme les yeux.

Ouvre les yeux.

Fixe la flamme sur la bougie.

Tu fermeras les yeux
quand tu en ressentiras le besoin.

Tu vois toujours
la petite flamme dans tes yeux ?

Accroche-toi à cette image.

Si d'autres images apparaissent,
recommence et reviens à la flamme.

C'est la vie qui continue à palpiter
tout doucement en toi.

Tu mets tes genoux sur ta poitrine,

et ensuite
tu montes en chandelle.

- Je sais pas la faire.
- T'as appris ça à l'école.

Hop. Force-toi.

Essaye de verticaliser au maximum.

Baisse tes bras...
Tes mains le plus bas...

Le plus bas vers le sol
pour tenir bien.

Bon. Après...

Ben, regarde-moi.

C'est en pente ou quoi ?

- Bonjour, madame.
- Bonjour.

- Asseyez-vous.
- Merci.

Je vous en prie.

Geneviève arrive dans 10 minutes.

Ces pierres étaient-elles
des objets de culte,

des observatoires astronomiques ?

Que cherchaient les hommes
préhistoriques dans le ciel ?

Les âmes des disparus,
comme croyaient les Incas ?

Ces figures étaient-elles
de gigantesques oiseaux

ou des pistes pour dieux astronautes
dans le désert de Nazca ?

Toujours dans l'Antiquité ?

- Elle va mieux, votre amie ?
- Oui.

- Au revoir, Roland.
- Au revoir.

Lisez ça dans votre voiture,
s'il vous plaît.

D'accord.

"Belles, vous passez pures,
toutes deux.

"Que vous fait ce monde
ingrat et hideux ?

"Vous êtes deux sœurs,
vous êtes deux vierges.

"Comme sur l'autel
s'allument les cierges,

"vos âmes ont mis leurs flammes
à vos fronts.

"Belle, je voudrais voir
sur vos bras ronds,

"sur votre poitrine
et sur votre hanche,

"s'entrouvrir les plis
de la gaze blanche.

"Belle, je voudrais voir
votre sein nu,

"votre pied charmant,
pudique, ingénu.

"Et je voudrais voir vos épaules,
Belle,

"pour chercher la place
où furent les ailes."

Voilà, mademoiselle.

Allez, hop.

Voilà.

- Aïe.
- Chut. Bouge pas comme ça.

Aïe.

Voilà. Voilà. Voilà. Voilà.

Aïe.

Hop.

C'est presque fini.
T'as plus rien.

Pourquoi tu cries ?

On va croire que je te torture.

Céline ?

Je ne rentrerai pas avant 21 h.

Tu touches pas à ma chambre.

Bisous.

- Bonsoir.
- T'as vu l'heure ?

Ça va être froid.

Et puis tu pues l'hôpital.

J'ai passé la soirée à veiller
quelqu'un en train de mourir.

Qu'est-ce que c'est que ça ?

C'est pour toi.

Ça aussi.

Ben...

Eh ben...

- Eh ! C'est pour moi ?
- Ben oui.

Oh, merci.

C'est super.

Bonjour.
L'infirmière peut nous recevoir ?

C'est pas le jour des visites,
aujourd'hui.

Bon. Je vais voir.

Geneviève ?

Oh, merde.

Excusez-moi.

Entrez.
Elle arrive dans 5 minutes.

- Tu le vois souvent ?
- Entre deux portes.

C'est pas très romantique.

Je préfère.

T'es amoureuse ?

Je l'aime bien.

J'ai décidé
de ne plus jamais aimer personne.

Mon mari m'a quittée
pour une fille pas plus jolie,

mais qui avait l'avantage d'être là.

Ça a été l'enfer.

J'ai eu l'impression
de n'être plus rien, comme toi.

Avec une maladie de cœur
qui s'est déclenchée

et des reproches qui tournaient
dans ma tête.

Oui. Tu m'as raconté.

Je me suis jamais sentie
aussi misérable.

Je me suis tapé tous les types
que je rencontrais.

Un médecin m'a conseillé
les exercices de relaxation, le yoga.

Ça ou autre chose...

Il me donnait aussi des mots,
des mantras...

À répéter pendant des heures

pour m'empêcher de penser.

Ça a fini par me calmer.

- Le médecin du yoga, c'était lui ?
- Oui.

- Il est rigolo.
- Oui.

Mais la passion, c'est fini.

Je l'aime bien.
Et lui ?

- Lui, quoi ?
- Il t'aime ?

J'ai l'impression
qu'il tient à moi à sa façon.

On s'aime chacun de notre côté,

sauf de temps en temps.

Les dernières aventures
que j'ai eues,

ça inspire pas confiance.

C'est vrai aussi
que je me sens seule, des fois.

Sauf depuis qu'on vit
ensemble toutes les deux.

Mais un jour, tu me diras de partir.

- Geneviève... Geneviève ?
- Quoi ?

T'as vu l'heure ?
Regarde.

Oh, mon Dieu !

J'y vais la première.
Je suis très en retard !

- Je te l'ai préparé.
- C'est gentil.

Tu peux préparer un thé
avec des tartines

et un jus de fruits ?

Tiens.

Oh là là !
Mais c'est tout prêt.

Céline ?

Je ne rentre pas avant 12 h 30.

Céline, c'est prêt.

Céline ?

Céline ?
Tu te réveilles ?

Zut.

Hé ! Pas comme ça !

Il faut pas couper, mais arracher.
Sinon, ça repousse.

On voit que t'as fait ça
toute ta vie.

Allez.

Tu prends par la base, comme ça.

T'as la racine qui vient avec.

Oh, oh !

- Les filles !
- C'est Jacquot.

Ça va ?

- Oui. Comment ça va ?
- Très bien.

- Vous faites quoi ?
- On jardine.

On voulait aller au ciné.

- Ben, je vous emmène.
- Ouais !

- Quoi ?
- Il va nous emmener au cinéma.

On ira au restaurant après.

Non.

Qu'est-ce qu'il y a ?

Je préfère y aller à vélo.

30 km à vélo.
Ça va pas, non ?

Et c'est un copain, Jacquot.
Tu le connais.

On y va à vélo.

Désolée.
Elle veut pas y aller.

Elle est bêcheuse.

- Elle veut qu'on y aille à vélo.
- Une autre fois, alors.

- Allez.
- Salut.

- Salut.
- Merci, Jacquot.

- À bientôt.
- Au revoir.

T'es chiante, tu sais.

ALOUETTE, GENTILLE ALOUETTE
ALOUETTE, JE TE PLUMERAI

Allez-y.

C'est la voiture de Jacquot.

Qu'est-ce que tu fais là ?

Je me suis fait mal.
L'infirmière va bientôt arriver ?

Elle sera pas là avant 15 h.

Vous pouvez me faire
un pansement ?

Viens avec moi.

Mais t'as rien.

Rien du tout.

- Ça fait pas mal ?
- Non.

Et là, non plus.
Montre.

- Tu m'as fait une farce ?
- Non.

Regarde.
Il y a rien, là.

Je vous jure. J'ai saigné.
Regardez, il y a du sang partout.

Tu m'as fait une farce.

- Allez, file.
- Mais je vous jure.

Tu pourras dire à tes copains
que tu m'as eue.

Tu m'as fait peur.

Qu'est-ce que tu fais
en chemise de nuit ?

Mademoiselle ?
Mademoiselle ?

Roland ! Attends !

Tes jambes ont bougé.
Fais un effort.

Essaye de marcher.

Lève-toi.

Encore, allez.

Encore.

Continue. Continue.

Tu y arrives.

Voilà.

Tu marches.

Tu marches.

Cette partie de la moelle épinière
manquait au gamin.

C'est pour ça
qu'il pouvait pas marcher.

- Et comment ça lui est revenu ?
- J'en sais rien.

Tiens.
Ça, ça date de 2 ans.

C'est incontestable.

On voit distinctement
la partie qui manquait.

Tu en penses quoi ?

Rien.
Je suis comme toi.

Je me demande comment
ça a pu se transformer tout seul.

Que t'est-il arrivé ?

Si tu me promets de ne rien dire.

J'ai commencé par voir des lumières.

Des sortes d'apparitions.

Par entendre des sons étranges.
Une fois,

je me suis sentie
transportée ailleurs.

Plusieurs fois après,

j'ai eu l'impression
que mon esprit ou mon âme

était un feu
qui projetait des flammes immenses

qui n'arrêtaient pas de grandir.

Alors il s'est passé
quelque chose d'étrange.

J'ai été comme enlevée
dans un autre monde.

Et je me suis retrouvée unie.

Unie à quoi ?

Les mots correspondent pas.

C'était disons Dieu.

Mais pas la représentation
qu'on en a.

J'avais l'impression de fondre,

que mon corps n'existait plus.

C'était comme un délice.

Je ne faisais plus qu'une
avec l'univers.

Et j'étais enveloppée
d'un immense sentiment d'amour.

Au réveil, il me devient pénible
de vivre.

Toutes les choses d'ici
me semblent étrangères.

Je me sens écartelée.

Sans aucun secours
de ce monde que je viens de quitter.

Mais sans aide non plus
du nôtre que je n'habite plus.

J'éprouve alors une douleur terrible,

et en même temps, un immense
sentiment de détachement.

Au début,
j'ai eu réellement peur.

Je sentais pas son pouls.

Elle avait les bras
et les jambes écartés.

Tu l'as vue en lévitation ?

Je crois l'avoir vue en lévitation.

Avec l'obscurité,
c'est difficile à dire.

Pourquoi elle ?

Moi aussi,
ça aurait pu m'arriver.

Tu te souviens
quand je pratiquais le yoga ?

Un jour,
j'étais en pleine méditation,

tout à coup,
j'ai eu l'impression de flotter

au-dessus d'un gouffre noir.

J'étais si terrorisée que j'ai arrêté.

C'était donc ça ?

À l'époque, je croyais
que tu en avais marre de moi.

Tu vas pas encore
me reprocher ça.

Toute la vie ?

Toute la vie ?
Sûrement pas.

On va pas se quitter comme ça,
pour des bêtises.

Dis...

En attendant, évite de raconter ça.

À personne ?

Personne.

Vous pourriez avoir des ennuis.

Excusez-moi.

J'ai vu la porte ouverte,
alors je suis rentré.

Je m'appelle Lucien.

Je suis venu vous demander
de me guérir, sans espoir,

puisque d'être comme nous,
c'est pas une maladie.

J'ai passé 10 ans de ma vie
dans un couvent.

J'ai souffert, j'ai prié,

j'ai supplié.

Je n'ai jamais eu
que le silence en réponse.

Et puis, je Le vois,
là, tout prêt de vous.

Je vous en supplie, mademoiselle,

quand Il reviendra, demandez-Lui

suppliez-Le de venir à ma table.

- Vous Lui demanderez ?
- Je demanderai à qui ?

Mais vous savez bien.

Il était là, près de vous,
à votre droite.

Silencieux.

Je L'ai reconnu.

Il était vrai.

Plus vrai que la réalité.

Vous le savez bien.
Vous êtes une sainte.

Je vous en supplie...
Priez pour moi.

- Vous allez où ?
- Chez l'infirmière.

Mon chat a été touché
par une voiture.

Mais il faut le montrer
au vétérinaire.

Bon. Allez, montez.

Venez avec moi.
Je vais voir ce que je peux faire.

C'est l'autre dame que je veux voir.

C'est moi, l'infirmière.

Mais elle fait des miracles.

- "Des miracles" ?
- Oui, des miracles.

Les miracles, ça soigne plus vite
et ça fait pas mal.

Bon. Allez, avancez.

- Il s'appelle comment ?
- Minette.

Geneviève !

- Bonjour.
- Bonjour, Sébastien.

- Vous avez pris rendez-vous ?
- Non.

- Je ne travaille pas, aujourd'hui.
- C'est pas vous qu'on venait voir.

La demoiselle acceptera
de nous recevoir ?

De toucher mon fils ?

On attendra autant qu'il faudra.

Je vais voir ce que je peux faire.

Ce qui nous importe,
c'est d'être là, dans son entourage.

Bon. Venez avec moi.

Voilà.

Il faudrait le montrer
au vétérinaire.

Mais non, à la dame.

Allez.

Pourquoi vous voulez pas
que je le montre à la dame ?

Pour le guérir.
Il a jamais fait de mal à personne.

Mais ça n'existe pas,
les miracles.

Allez, au revoir.

Tu ne peux pas
les laisser comme ça.

- Mais je peux rien pour eux.
- Mais essaye.

On s'est permis d'entrer.

Ils partiront pas.

- Je fais quoi ?
- Mets ta main sur leur tête.

Improvise.

Tu t'appelles comment ?

Sébastien.

- Vous vous appelez comment ?
- Germaine.

- Vous vous appelez comment ?
- Léon.

Vous vous appelez comment ?

- Tu t'appelles comment ?
- Antoine.

Voilà. Ils sont tous partis.

Ne t'en fais pas.
Ils sont partis contents.

Je crois que tu leur as fait du bien,
quand même.

Je m'en vais.

Tu peux rester ici
autant que tu veux.

Mais tu t'en vas où ?

Là où personne n'aura idée
de venir me chercher.

C'est-à-dire ?

Pourquoi ?
À cause de moi ?

À cause d'eux ?

Dans 15 jours,

tout le monde t'aura oubliée.

Tu pars pour longtemps ?

Très longtemps ?

Pas pour toujours
quand même.

Retomber dans ce monde
est un déchirement.

Tu es complètement folle.

Je suppose que ce que je pourrais
dire ne servira à rien.

Tout ça, c'est de l'orgueil.

Tu m'accompagnes à la gare ?

Alors moi, tu me laisses tomber ?

Toi, t'as tes malades, ta vie.

Ma vie, c'était toi.

Tu m'accompagnes ?

Tu pars vraiment ?

Tu m'accompagnes jusqu'au train ?

Chaton, c'est Gérard.

T'es là ou t'es pas là ?

Je suis revenu de mon congrès.
Impossible de te joindre.

J'ai entendu
dire qu'avec tes malades,

ça n'allait pas très fort.

Tu viens en retard ou pas du tout,
tu leur fais mal.

Ils commencent à se plaindre.

Tu risques de perdre des patients.

Qu'est-ce qui se passe ?

Appelle-moi vite.
Je t'embrasse.

"Ma chère Geneviève,

"J'ai passé tous ces mois
dans un couvent.

"Au début, pour me cacher.

"Et j'y ai trouvé ma voie.

"Je me suis donnée tout entière.

"Mes actes, les conséquences
de mes actes, ma vie

"ne m'appartiennent plus.

"Je ne suis rien. J'obéis.

"Je suis totalement heureuse.

"J'ai prié, j'ai été exaucée.

"Les manifestations anormales
autour de moi ont cessé.

"J'ai prononcé mes vœux.

"On va m'envoyer en mission
à la frontière chinoise

"pour très longtemps.

"Peut-être pour toujours.

"Quand tu liras cette lettre,
je serai donc bien loin.

"J'ai engagé une procédure
de donation.

"Tu vas recevoir les papiers.

"Le vieux moulin
t'appartient désormais.

"J'espère être utile
à soulager la misère du monde.

"Adieu. Sois heureuse.
Merci.

"Céline."

Bonjour. Dr Chesnaud n'est pas là.
Laissez-lui un message.

Ça va pas du tout.

Tu peux venir me voir d'urgence ?

Sinon, viens chercher le chat demain.

N'aie plus jamais peur.

Ça viendra nous chercher,
toutes les deux.

Nous nous verrons plus jamais.

Mais je serai toujours là,
près de toi,

jusqu'au départ qu'on fera ensemble
le moment venu.

Alors tu verras.

Tu seras baignée
dans un immense océan d'amour.

Allô ?

- Allô ? Ça va ? Tu vas bien ?
- Oui.

Je viens d'entendre ton message.

J'ai jamais eu aussi peur.
J'ai cru te trouver morte.

Alors tu bouges pas. Reste au lit.
J'arrive.

Mais avant...

Je ne veux plus te laisser seule.

On devrait vivre ensemble
au vieux moulin.

Définitivement mariés,
si tu veux.

- Oui.
- Oui ?

J'ai des tas d'idées,

mais il faut qu'on en discute.

Je suis là dans 20 minutes.

En attendant, tu bouges pas.
Reste dans ton lit.

Juste le temps de te dire "je t'aime"
et je raccroche.

Sous-titrage : Eclair Group